SERIGNE BABACAR SY ABDOU

Historique sur son bonnet, son pseudonyme et son retour au daara

Depuis quelques années, au Sénégal, le port des « Laafa Banjul », communément appelés « Cabral », fabriqués en République Tchèque, ne fait plus seulement référence à Amilcar, du nom de ce révolutionnaire Bissau Guinéen qui a mené son pays vers l’indépendance. En effet, Serigne Babacar SY Abdou porte avec humilité et fierté, ces bonnets en laine bordés de carreaux zigzagants, et avec élégance aussi ! En public, en cérémonie ou au milieu de ses élèves, d’une démarche altière, il le porte comme le faisait son «toureundo» : « duko wengal duko jengal ». « Ndiol Fouta », le nom que lui attribuent souvent bon nombre de sénégalais, en souvenir de ses études à Thilogne dans la région de Matam au nord du Sénégal. Pourtant, Mame Abdou Aziz Sy « Dabakh » (RTA) préférait qu’on l’appelât Serigne Babacar dont il portait le nom. En effet, il se raconte qu’un jour, après avoir remarqué que Pape Serigne Mbaye ne répondait pas aux interpellations par ce pseudonyme, Mame Abdou avertit l’assistance : « D’autant plus qu’il ne réagit pas lorsque vous dites « Ndiol Fouta », je vous supplie de ne plus l’appeler ainsi. Je lui ai donné le nom de mon frère, ami et marabout, Serigne Babacar SY et par ce nom je voudrais que vous vous adressiez à lui ». Entre Pape Serigne et Mame Abdou s’est créée depuis longtemps une complicité tendre et affectueuse. Nous sommes au début des années 80 lorsque le jeune étudiant de l’Université Quarawiyine à Fez au Maroc était venu en vacances d’été. À ce moment, il sentit avoir amassé suffisamment de connaissances dans les allées de la Médina où repose Cheikh Ahmed Tidiane Chérif (RTA), le fondateur de la Confrérie Tidiane. Il alla alors rencontrer son père pour lui annoncer qu’il ne voulait plus retourner au Maroc et qu’il préférerait rester au Daara de Seydil Hadji Malick SY pour perpétuer son legs. En réalité, il avait entendu des années avant Mame Abdou formuler le vœu de voir un jour « Ken ci xaleyi » lui succéder dans la gestion pédagogique et administrative du Daara, qui est l’héritage de Mame Maodo. Pape Serigne lui, avait enregistré ce souhait quelque part dans son cœur et attendait le bon moment. Ainsi, à l’annonce de la nouvelle, Mame Abdou sursauta de son fauteuil pour l’avertir que c’était une lourde décision et qu’il voudrait prendre en témoin Seydil Hadji Malick (RTA). Il le prit par la main pour aller se recueillir ensemble devant le mausolée de Mame Maodo où il lui demanda de répéter les paroles qu’il venait de lui adresser. 

Pape Serigne répéta sans hésitation, ni ambiguïté : « Oui je veux rester à Tivaouane m’occuper du Daara, laissé en héritage par Seydil Hadji Malick Sy (RTA) ». Depuis ce jour, il ne quitte plus ce lieu de culte et de connaissance. Au Daara, tous les jours, des milliers de Talibés y apprennent et mémorise le Coran en psalmodiant. En effet, un concert polyphonique, fait d’une symphonie de voix enfantines, se crée autour de valeureux maîtres coraniques. Aujourd’hui plusieurs animateurs des plateaux religieux de nos télévisions, privées comme publiques ou qui brillent dans les Gamous et conférences pour raconter avec éloquence l’histoire du prophète, ont été formés par Serigne Mbaye Sy Abdou lui-même. Avec son allure élancée rappelant celle de Mame Maodo, l’intellectuel arabophone, privé des années glorieuses de Tivaouane a été envoyé onze (11) années de sa tendre jeunesse à Thilogne au Fouta pour être formé auprès du grand érudit Seydi Thierno Abdou Khadre LY, en compagnie de son jeune frère, son Excellence Serigne Cheikh Tidiane SY (actuel ambassadeur du Sénégal en Arabie Saoudite). Ce qui lui a permis de maîtriser la langue Halpular. Il arrive ainsi à faire des dictons et à raconter des anecdotes en Pulaar, ou à faire des études lexicales comparatives entre le Pulaar et le Wolof. Il manie parfaitement le pulaar, ce qui lui vaut une très grande affection en milieu Halpular

Selon lui, être musulman se caractérise par la tolérance, la droiture et un sens élevé de l’abnégation. Papa Serigne Mbaye pose souvent les questions à savoir si « Nous sommes de véritables Musulmans ? », ou alors « si c’est vrai que la population sénégalaise est composée de quatre-vingt-quinze pour cent (95%) de musulmans? » Ces questions méritent une remise en question personnelle de tout un chacun surtout de tout talibé qui se réclame être un fils de Papa Serigne Mbaye. Ses conférences publiques sont très interactives. Il n’hésite pas à se prêter à un jeu de questions réponses entre ses interlocuteurs et lui, sur la pratique religieuse. Ses vidéos d’enseignement sur des pratiques telles que le Tayammom ou la prière se partagent sur les réseaux sociaux. Humilité, sacerdoce, mansuétude, sagesse, fidélité, « kersa » à la limite de la timidité, sont les traits de caractère les plus connus de Papa Serigne Mbaye. En ses nobles qualités nous comprenons son inquiétude, qui est de préserver un statut sincère du Musulman Sénégalais. D’ailleurs, une de ses occupations quotidiennes est de reconstituer la bibliothèque de référence de Seydil Hadji Malick SY (RTA), sur la base des ouvrages avec lesquels ce dernier a fait ses humanités. Il n’est pas rare de tomber sur des livres avec des annotations et commentaires du patriarche de Tivaouane sur les sujets qui y sont abordés et toujours en conclusion, la mention : « Tere bi amelatumako axx ». Cette bibliothèque regorge également de livres rares sur tous les sujets ayant trait à la religion musulmane, y compris les attaques qui sont faites à son encontre. Avec une voix mélodieuse, il lui arrive également de chantonner les quassidas des grands érudits de Tivaouane, rivalisant ainsi avec les chanteurs les plus connus de notre époque. Son discours sur les préparatifs du mariage tels que enseignés par Seydil Hadji Malick est d’une haute facture intellectuelle. 

error: Contenu protégé par l'administrateur !!